Tenir compte de Bruxelles
Bruxelles est à la fois un centre de richesse, l’activité économique y est très importante et un centre de pauvreté. Le taux de chômage à
Bruxelles est plus important qu’en Flandre et en Wallonie. Bruxelles est de plus en plus une ville duale composée d’habitants riches et d’habitants
pauvres. L’exode des classes moyennes vers la périphérie se poursuit même si c’est à un rythme ralenti. C’est à Bruxelles que la part de la
population sous le seuil de risque de pauvreté est la plus élevée : 30% à Bruxelles pour 18% en Wallonie et 11% en Flandre. (cf. Rapport
Bruxellois sur l’état de la pauvreté 2007 de l’Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles).
Le Produit Intérieur Brut/habitant qui était encore fin des années nonante à Bruxelles supérieur à la moyenne nationale est aujourd’hui inférieur à
celle-ci.
Investir dans le rôle de capitale nationale et internationale
Bruxelles, capitale de la Belgique et siège des institutions européennes, a tout intérêt au maintien de la Belgique. Rien ne garantit que Bruxelles
conserve son rôle international si la Belgique éclatait. Les retombées de la présence de nombreuses institutions internationales à Bruxelles ne
bénéficient pas uniquement à la région bruxelloise mais aussi à la Flandre et à la Wallonie. Bruxelles est un atout pour toute la Belgique et pour
tous les Belges. La Belgique est une plus-value pour les wallons, les flamands et les bruxellois. Conservons cette plus-value et investissons dans
le développement international de Bruxelles.
Elargir les limites de Bruxelles et créer une communauté urbaine
Bruxelles est aujourd’hui artificiellement limitée à 19 communes. Les limites socio-économiques de Bruxelles sont bien plus larges. Une récente
étude de géographes de la KUL vient encore de le démontrer. Elle considère que la Région urbaine de Bruxelles englobe 62 communes.
Les limites socio-économiques et politiques de la Région ne correspondront jamais. Pourtant il est indispensable qu’un ensemble de compétences
(certains travaux d’infrastructures, les transports, les déchets, les pompiers, …) soient gérées à un niveau plus large que les 19 communes. Une
manière de rencontrer cet objectif et de créer une communauté urbaine qui pourrait fonctionner sur le modèle d’une société intercommunale à
laquelle seraient affiliées les différentes communes, les trois Régions et les autorités provinciales du Brabant-wallon et du Brabant-flamand.
Une telle communauté respecterait les statuts linguistiques des différentes communes qui en feraient parties. Il est encourageant de constater
que le Premier Ministre M. Verhofstadt en est aujourd’hui partisan.
Les limites politiques de la Région doivent pour leur part correspondre à la volonté des populations. Ce qui signifie l’élargissement de Bruxelles
aux 6 communes à facilités. La création de ces communes en 1962 fut un mauvais compromis. En ne respectant pas le statut linguistique de ces 6
communes, la Flandre ne laisse pas d’autres choix.
L’élargissement de Bruxelles de 19 à 25 communes permettrait alors d’envisager la scission de l’arrondissement électoral de Bruxelles-Halle-Vilvorde.
Donner à Bruxelles les moyens financiers qui lui reviennent
Depuis la régionalisation du Fonds des communes en 1974 (réalisée à l’époque pour refinancer les communes wallonnes), Bruxelles souffre d’un
sous-financement. Ses charges de capitale nationale et internationale sont insuffisamment compensées par l’Etat fédéral. Plusieurs études
universitaires ont évalué ce sous-financement à environ 350 millions d’euros.
De nombreux wallons, de nombreux flamands bénéficient des services qu’offre la Région bruxelloise où ils trouvent un emploi. De toutes les
capitales européennes Bruxelles est la ville la moins soutenue par l’Etat dont elle est la vitrine sur le monde. Le refinancement de la
Région bruxelloise est vital pour son avenir.
Le fait que les ristournes d’impôts aux régions s’effectuent sur base du domicile et non du lieu de travail engendre pour la Région bruxelloise une
perte annuelle d’environ 400 millions d’euros. Il serait plus équitable que ces ristournes d’impôts s’effectuent pour moitié sur base du domicile et
pour moitié sur base du lieu du travail.
Si cette voie n’était pas retenue, il faut alors qu’intervienne un refinancement de Bruxelles par l’Etat Fédéral. Comment l’estimer ?
En Allemagne, les villes-état (Berlin, Brême et Hambourg) bénéficient d’un traitement financier différent de celui des autres Lander : leur population
fait l’objet d’une augmentation fictive de 35% afin de déterminer la part de financement à laquelle elles ont droit. Diverses études ont montré en
Allemagne que ce traitement différencié était justifié pour compenser les dépenses de grand centre urbain auxquelles les villes-état doivent faire
face et qu’elles ne peuvent répercuter sur leur grande banlieue.
Majorer par le biais d’une dotation fédérale de 35 % les recettes fiscales à l’impôt des personnes physiques ristournées à la Région bruxelloise
donnerait à celle-ci les moyens financiers qui lui sont nécessaires. Un tel refinancement s’élèverait à environ 260 millions d’euros.
Régionaliser l’emploi et la formation professionnelle
Un bruxellois actif sur cinq, un jeune de moins de 25 ans sur trois est au chômage. La régionalisation de la politique de l’emploi est une
revendication flamande. Nous ne devons pas nécessairement la repousser. Elle peut être une chance pour Bruxelles si elle s’accompagne des
moyens financiers ad hoc et d’une régionalisation de la formation professionnelle.
La Région bruxelloise ne peut aujourd’hui (contrairement à la Flandre ou à la Wallonie) décider de par exemple subsidier moins les investissements
des entreprises et d’augmenter les dépenses de formation professionnelle. Le même chômeur dépend de trois organismes : l’ONEM pour
l’indemnisation, ACTIRIS pour le placement et selon qu’il soit francophone ou néerlandophone, Bruxelles-Formation ou le VDAB pour la formation.
Ce n’est pas un gage de succès et de réussite pour les politiques de l’emploi.
Refinancer l’enseignement et recentrer sur les écoles les moyens disponibles pour les politiques d’intégration
Deux tiers des chômeurs bruxellois sont peu qualifiés. Un tiers des chômeurs ont au plus le diplôme de l’enseignement secondaire inférieur.
Une autre caractéristique du chômage bruxellois est que celui-ci est de plus en plus un chômage de longue durée. Plus de six chômeurs sur dix le
sont depuis plus d’un an. Bien souvent l’éducation de base des chômeurs est insuffisante pour leur permettre de suivre avec succès des formations
professionnelles.
La communauté française doit intervenir plus dans l’enseignement à Bruxelles et accroître en particulier les moyens pour les écoles à discrimination
positive. C’est également vers les écoles que doivent être recentrés les moyens disponibles pour les politiques d’intégration. L’école et les
activités qui se déroulent autour de celles-ci sont le premier facteur d’intégration.
Développer le secteur bicommunautaire
En dehors du social, le secteur bicommunautaire n’a pas été développé à Bruxelles. C’est une erreur. Dans un domaine comme celui de la culture les
bruxellois francophones et flamands ont tout intérêt à développer des actions en commun. Y compris dans le domaine règlementaire. Certains décrets
de la Communauté flamande ne s’appliquent qu’à la Région flamande et de la Communauté française qu’à la Région wallonne. Avec pour conséquence
qu’il n’y a par exemple aucune législation à Bruxelles concernant le classement des œuvres artistiques et l’interdiction d’exporter certaines
d’entre elles.
Améliorer le fonctionnement des institutions bruxelloises
Les institutions bruxelloises sont très complexes en partie de par la présence et l’organisation de la coexistence de deux communautés linguistiques
différentes sur un même territoire. Bruxelles est d’autre part divisée en dix-neuf communes.
Un parlement avec 89 députés pour Bruxelles, c’est beaucoup trop. Ce nombre doit être réduit. La répartition des compétences entre les communes,
qui ont l’avantage d’être un pouvoir de proximité, et la Région doit être claire. Chacun de ces deux niveaux de pouvoir doit faire ce qu’il est le
mieux à même de faire en fonction du principe de subsidiarité. La fusion des communes serait une erreur. Elle ne ferait qu’éloigner le pouvoir des
citoyens.
L’efficience institutionnelle, c’est aussi un Parlement bruxellois qui vote des lois (des ordonnances comme elles s’appellent à Bruxelles) à bon
escient et qui évite une inflation de textes législatifs mal conçus. Cela pose la question d’une deuxième lecture des textes votés au Parlement et
d’une évaluation régulière de leur application.
L’efficience institutionnelle, ce sont des administrations communales et régionales qui peuvent recruter des fonctionnaires de qualité. Ce recrutement
est aujourd’hui menacé et souvent impossible en raison d’examens linguistiques sans rapport avec les fonctions à pourvoir, examens organisés par
le SELOR (l’organisme fédéral en charge des examens de recrutement pour l’Etat). Les examens linguistiques doivent être adaptés et la création
d'un SELOR régional envisagée.
Bruxelles a commencé à réorganiser le secteur des intercommunales en fusionnant les intercommunales de gaz et d’électricité et en fusionnant dans
le domaine de l’eau l’IBDE et l’IBrA. Elle doit poursuivre dans ce dernier secteur la rationalisation des intercommunales en fusionnant Vivaqua
et l’IBDE. Une même intercommunale doit pouvoir assurer à la fois le rôle de production et de distribution de l’eau.
Conserver une Région gérée par et pour les bruxellois
L’acquit d’une Région bruxelloise gérée par et pour les bruxellois doit être conservé. Le devenir de Bruxelles, ce n’est pas être un district géré
par l’Europe ou être une ville-région cogérée par les Wallons et les Flamands.
Les bruxellois ne sont pas comme les décrivait Jules Destrée « un agglomérat de métis » qui auraient « additionné » les défauts « des Flamands et
des Wallons ». Ce sont des femmes et des hommes aux identités multiples et attachés dans leur très grande majorité à leur ville-région, à leur
communauté, à leur pays.